La nécessité absolue de s’assurer de l’absence de contaminants dans l’eau ou les solutions peut constituer un problème important pour les fabricants de produits pharmaceutiques, de produits cosmétiques et les laboratoires de recherche. Cet article a pour vocation d’éclairer ceux qui ont des problèmes bactériologiques « récurrents » sur leur boucle d’eau.
La limitation de la contamination microbiologique
Le maintien de la propreté microbiologique d’une installation de production et distribution d’eau purifiée est un challenge que l’industrie pharmaceutique doit relever à tout instant. Le problème majeur est d’évaluer le niveau réel de contamination ou développement d’un biofilm sans pouvoir accéder à l’intérieur de l’installation.
Pour en savoir plus sur le biofouling et les solutions à mettre en oeuvre
A savoir :
BIOFILM
Un biofilm est une couche de micro-organismes, contenus dans une matrice solide, adhérant les uns aux autres et/ou aux surfaces. L'intégration d'organismes pathogènes dans les biofilms peut les protéger de l'action de biocides, à haute concentration, qui les auraient détruits ou inactivés sans cela.
En effet, l’échantillonnage microbiologique, tel que pratiqué aujourd’hui, ne permet de mesurer uniquement la quantité de micro-organismes « pionniers » ou libres au gré du flux. Les micro-organismes (temporairement) fixés sur les parois et constituant un biofilm sont plus nombreux mais sont invisibles à l’analyse car pas échantillonnés.
Le biofilm représente dès lors une bombe à retardement potentielle pouvant lâcher à tout moment des paquets de cellules libres allant se fixer ailleurs pour développer de nouvelles colonies. Prendre toutes les mesures préventives pour empêcher la formation de biofilm est une approche nécessaire pour garantir à long terme la conformité du système à un coût acceptable.
Première mesure préventive : L’investissement
Le choix de la qualité de l’installation est déterminant car comme souvent, un investissement minimum risque de coûter plus cher à l’utilisation.
L’acier inox de qualité est de loin préférable à la plupart des matériaux plastiques à condition de soigner la finition des surfaces, la qualité des soudures, des raccords, des sièges et joints de vannes, etc.
Chaque détail de finition est important pour plus tard empêcher les micro-organismes libres de s’implanter sur les surfaces profitant d’une aspérité, d’une soudure proéminente, d’une crevasse, d’un raccord, d’un joint… et d’y développer un biofilm.
La bio-décontamination continue ou permanente
Il est possible de préventivement détruire en continu les cellules « pionnières » ou libres avant qu’elles ne se fixent sur un support. Les deux méthodes les plus souvent utilisées en continu sont :
- La chaleur
- L’ozonation.
L’élévation en température ne pose aucun problème de résidu ; 60-65°C suffisent pour détruire les « pionniers » et les empêcher de s’implanter.
L’ozone est un agent chimique qui en continu offre une très bonne efficacité à 0,04 ppm mais ce composé doit être détruit par une lampe UV à 254nm avant tout point d’utilisation. Il est à noter par contre que l’utilisation d’UV 254 nm peut générer des endotoxines…
La bio-décontamination discontinue
En remplacement ou en complément d’un traitement continu, la bio-décontamination discontinue utilise de manière périodique de l’eau chaude, de la vapeur ou un agent chimique oxydant. Ce traitement ponctuel a pour but de tuer les cellules isolées mais également de détruire un biofilm déjà formé.
La chaleur
L’eau chaude est de loin préférable à la vapeur sèche difficile à manipuler, incompatible avec certains équipements ou matériaux et nécessitant une installation spécialement étudiée.
De plus, la vapeur va détruire un biofilm en le cuisant. Ces résidus de matière organiques seront autant d’aspérités et de nourriture favorables à l’implémentation et au développement de nouvelles cellules pionnières.
L’eau chaude n’est technologiquement pas simple à utiliser car si une eau à 55°C est suffisante pour détruire la plupart des micro-organismes, il n’est pas facile de maintenir une température d’eau élevée dans toute une installation, bras morts y compris.
Il faut également faire la chasse aux ponts thermiques, zones froides, matériaux plastiques et « flusher » les bras morts/vannes si la conduction thermique n’est pas optimum.
Conseil de l'expert :
Exemple de recommandations pour des traitements à l’eau haute température en installation idéalement configurée :
- Eau à 65°C Minimum 8 heures
- Eau à 70°C Minimum 4 heures
- Eau à 80°C Minimum 2 heures
- Eau à 90°C Minimum 1 heure
Les agents oxydants :
Le tableau ci-dessous reprend les principaux agents oxydants utilisés et leur pouvoir d’oxydation.
Pouvoir d’oxydation relatif :
Chlore gazeux | (Cl2) | 1.00 |
Ozone | (O3) | 1.52 |
Acide Peracétique | (CH2OOOH) | 1.33 |
Minncare Cold Stérilant | (CH2C000H + H2O2) | >1.30 |
Peroxyde d’Hydrogène | (H2O2) | 1.30 |
Acide Hypocloreux | (HOCl) | 1.10 |
Dioxide de Chlore gazeux | (ClO2) | 0.70 |
Hypochlorite de Sodium | (NaOCl) | 0.69 |
En prenant le chlore comme référence, l’acide peracétique est après l’ozone le composé le plus actif sur les matières organiques. Il est commercialisé par nombre de fabricants, généralement en combinaison de peroxyde d’hydrogène avec, par contre des niveaux de pureté pouvant différer.
Il est utilisé par de nombreux sites pharmaceutiques à travers le monde. Un tel traitement de choc sur toute une installation permet de détruire suivant les définitions de la pharmacopée toute vie microbiologique isolée ou sous forme de biofilm.
Le choix d’une formulation chimique se fait donc en fonction de son efficacité mais également par rapport à la concentration chimique nécessaire ; une faible concentration permet de limiter au maximum le temps de rinçage, la quantité d’eau nécessaire et le temps d’immobilisation des installations.
Les formulations chlorées ont une efficacité très dépendante du pH de la solution. Les eaux purifiées ayant un pouvoir tampon faible, il y a toujours un risque d’efficacité moindre même si les concentrations sont respectées.
Les traitements limitant l’entrée de nouvelles cellules pionnières
Certains équipements permettent de limiter l’entrée des micro-organismes pionniers et donc de retarder l’apparition d’un biofilm et/ou l’apparition d’une contamination excessive.
Le rayonnement UV
Une lampe UV émet un rayonnement lumineux Ultraviolet qui permet de détruire les micro-organismes exposés. Ce rayonnement limite considérablement le nombre de cellules pionnières mais n’a aucune efficacité sur un biofilm installé.
Ce type de lampe utilisée en continu sur l’installation aura une efficacité moyenne à bonne en fonction de sa configuration pour limiter au maximum les zones d’ombre mais aussi en fonction de son dimensionnement et de la qualité de la maintenance. Qui dit lumière dit potentiellement « ombre ».
Ces zones d’ombre doivent être limitées au maximum car elles constituent autant de refuges pour les cellules. Des zones d’ombre peuvent être provoquées par une mauvaise configuration ou par un nombre trop important de microorganismes où certains se sacrifient pour protéger le passage des autres. Ce type de traitement est intéressant en amont d’une filtration stérilisante et permet de prolonger l’efficacité du filtre.
Conclusion
Une bonne protection contre les micro-organismes « pionniers » représente la clé pour éviter des problèmes de contamination d’une eau purifiée dans l’industrie pharmaceutique. Différentes technologies existent et peuvent se combiner afin d’améliorer les performances.
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